Améliorer la santé des hospitaliers
Dossiers à la une
À l’occasion du séminaire de la Fondation MNH et la Direction de la Recherche, retrouvez un état des lieux global sur les recherches et travaux en cours autour de ce sujet crucial.
Il y a un an, la Fondation MNH et la Drees dévoilaient les lauréats de leur appel à manifestation d’intérêt (AMI) commun, visant à mieux connaître l’état de santé des professionnels de santé. Le 19 mars dernier, un point d’étape avait lieu au ministère de la Santé et de la Prévention. L’occasion de faire un état des lieux plus global sur les recherches et travaux en cours autour de ce sujet crucial.
Un séminaire intitulé « La recherche sur la santé des professionnels de santé, travaux en cours » était organisé le 19 mars à l’initiative de la Fondation MNH et de la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees), en présence de deux ministres, Frédéric Valletoux et Fadila Khattabi, ainsi que de nombreux professionnels, chercheurs, représentants des institutions ou soignants mobilisés sur ce thème. Cette demi-journée d’échanges et de présentations a permis de dresser un premier bilan des recherches, mais également d’évoquer les engagements pris par les pouvoirs publics pour améliorer la santé des professionnels qui, au quotidien, veillent sur celle des autres.
« Un quart des soignants ont le sentiment d’être en mauvaise santé », a rappelé Frédéric Valletoux, ministre délégué chargé de la Santé et de la Prévention, qui a introduit ce séminaire, annonçant notamment le lancement imminent d’un comité de suivi sur la santé des soignants. Trois priorités seront au cœur de ses travaux : la mise en œuvre de mesures fortes pour renforcer la prévention et la protection des soignants ; le déploiement de dispositifs de soutien psychologique accessibles à tous et d’actions concrètes pour prévenir le burn-out et favoriser un meilleur équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle ; un renforcement de la formation continue pour maintenir les compétences des soignants à jour et favoriser leur épanouissement.
Le soutien conjoint de la Fondation MNH et la Drees
« La feuille de route du groupe de suivi ne sera pas un simple document, mais un engagement ferme envers les soignants », a précisé Frédéric Valletoux qui a conclu en insistant sur l’importance de la recherche pour faire progresser les connaissances sur le sujet.
Après des discours introductifs de Fabrice Lenglart, directeur de la Drees, et Franck Watremez, président de la Fondation MNH, la parole a donc été laissée aux équipes de chercheurs auxquelles leurs organisations respectives apportent un soutien pour deux ans.
Les projets concrets mis à l’honneur
• WOCAPREG se penche sur l’incidence de l’exercice de leur métier sur la grossesse des professionnelles de santé. L’équipe qui s’y consacre a pu préciser la méthodologie et le calendrier au projet, qui vise in fine à favoriser la détection et la prévention des risques chez les soignantes enceintes.
• TRAILSS étudie le lien entre les transitions professionnelles des infirmières et leur santé mentale. Les chercheuses mobilisées vont réaliser une trentaine d’entretiens pour nourrir leurs travaux et ainsi vérifier leur hypothèse, selon laquelle les addictions et les transitions professionnelles sont des réactions des professionnels de santé face à la souffrance et l’insoutenabilité du travail, le point de rupture étant la sortie du métier.
• CAPESSA porte sur les pratiques de dépistage, l'incidence et la mortalité par cancer chez les professionnels de santé. Alors que la littérature qu’ils ont passée en revue montre majoritairement une augmentation à la fois de l’incidence et de la mortalité, les chercheurs prévoient d’étudier aussi les différents facteurs de risques professionnels : exposition aux rayonnements ionisants et à des substances cancérogènes, travail de nuit ou posté…
• SOIGNANCES analyse justement les possibles liens entre expositions professionnelles et santé chez les soignants. Il met notamment en exergue la notion d’exposome, qui désigne les expositions à tous les facteurs non génétiques auxquelles sous soumis les individus, et la manière dont les matrices emplois-expositions aident à leur évaluation.
La Fondation MNH a également souhaité mettre à l’honneur deux nouveaux travaux de recherche. Le projet VALORIS, d’abord, qui a pour objectif de déterminer l’impact économique de la mauvaise santé des professionnels de santé. En la matière, « le laisser-faire s’arrête quand le coût de l’inaction devient supérieur au coût de l’action », explique Nicolas Sirven, de l’École des hautes études en santé publique (EHESP), qui souhaite doter les directeurs d’établissement d’un outil précis de mesure du coût de l’absentéisme et du présentéisme imputables à l’état de santé.
Dr Bénédicte Jullian a quant à elle détaillé le projet de revue de la « littérature grise » que constituent les dizaines de mémoires rédigés dans le cadre du diplôme inter-universitaire (DIU) « Soigner les soignants » : « L’idée est d’en extraire les données innovantes, atypiques ou originales et de valoriser ces productions qui proposent des outils concrets afin de produire, à terme, une synthèse pertinente. »
Une mobilisation générale de tous les acteurs
Pour la dernière partie de ce séminaire, Philippe Denormandie (Fondation MNH) et Élisabeth Fery-Lemonnier (Drees) ont tendu le micro aux représentants des agences et institutions mobilisées sur ce thème de la santé des soignants, pour qu’elles présentent leurs apports en la matière : des bases de données richement alimentées pour la Drees et Santé Publique France (SpF), des recommandations thématiques pour la Haute Autorité de Santé (HAS), des actions en faveur de la prévention des risques professionnels pour la Caisse nationale d’assurance maladie (CNAM), des travaux de recherche pour l’EHESP…
L’Agence nationale d’appui à la performance des établissements de santé et médico-sociaux (ANAP) met quant à elle des outils pratiques à la disposition des établissements de santé, tandis que l’Institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles (INRS) fournit des ressources d’une grande diversité sur la prévention des risques professionnels. L’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) vient pour sa part de consacrer une étude aux professionnels de santé exposés aux rayonnements ionisants.
Il s’agissait aussi, pour les différents participants et intervenants, de se mettre en relation pour « envisager des synergies » et « travailler de manière décloisonnée », comme les y a encouragés Philippe Denormandie. Le discours de la ministre déléguée chargée des Personnes âgées et des Personnes handicapées est venu clore cet après-midi d’échanges riches dans un même esprit de mobilisation. Rappelant qu’« un soignant qui se sent bien est un soignant qui soigne bien », Fadila Khattabi a dit la volonté à agir sur ce terrain et conclu avec optimisme : « l’énergie, les ressources intellectuelles et scientifiques, la volonté publique sont là. Donc il n’y a plus qu’à ! »