Améliorer la santé des hospitaliers
Focus prévention
Maxim Challiot : « La relation soignant-soigné est importante, pour le soigné comme pour le soignant »
Maxim Challiot, médecin spécialisé en médecine physique et réadaptation, s’est retrouvé côté patient durant ses études.
Une expérience qui a transformé sa vision de la relation patient-soignant et qui lui a ouvert une autre voie professionnelle. Il est aujourd’hui fortement engagé pour améliorer la qualité de vie et la santé des soignants.
Qu’est-ce qui vous a mené à vous intéresser à l’importance de prendre soin des soignants ?
Durant mes études de médecine, j’ai été atteint d’une maladie pulmonaire grave. Je me suis retrouvé en réanimation en soins intensifs, puis en chirurgie et en rééducation. Et cela m’a tout de suite confronté à cette problématique de la relation soignant-soigné. Quand j’étais en réanimation, j’étais un chiffre : si j’avais une bonne tension, pas de fièvre, cela voulait dire que j’allais bien. On pouvait même me parler de moi à la troisième personne dans les visites. Puis, en arrivant en rééducation, j’ai rencontré un médecin très humain et attentif à ce qui comptait pour moi. J’ai tout de suite compris l’importance de la relation soignant-soigné et l’impact que celle-ci peut avoir sur le soigné, mais également sur le soignant. Plus tard, durant mes études, j’ai aussi remarqué que la plupart de mes pairs souffraient d’être détachés de leurs émotions, comme on nous l’apprend.
Quelle trajectoire avez-vous suivie après cette expérience ?
Je m'étais promis d’être un médecin à l’écoute, même si la charge de travail était intense, et d’avoir une attention sincère pour les patients. J’ai réussi à tenir cet engagement quand j’ai débuté, en 2020. J'exerçais alors dans deux structures en parallèle, à l’hôpital public dans le champ du grand handicap et dans une clinique privée spécialisée dans l’appareillage des personnes amputées. Avec le temps, j’ai été contraint de prendre en charge de plus en plus de patients et parfois de les équiper de prothèses à l’encontre de leur volonté. Je me suis ensuite trouvé face à une autre dissonance cognitive, liée au coût environnemental du soin et en particulier des prothèses que l’on me demandait de prescrire. Autant de facteurs qui m’ont décidé à changer de voie et je suis aujourd’hui salarié dans le secteur médico-social.
Vous avez aussi observé la dégradation de l’état de santé des soignants : qu’en retenez-vous ?
En 2023, j’ai mené une thèse sur le la qualité de vie et la santé mentale des médecins généralistes 2023-2024. Je les ai questionnés et les résultats ont été un choc. J’ai pris conscience de la perte de sens dont ils souffrent. Ce sont des personnes qui ont une vocation, qui ont à cœur de bien exercer leur métier et qui sont contraintes de le pratiquer d’une façon détestable pour eux aussi. Il en découle une notion de qualité empêchée par le quotidien et par le flux incessant, administratif et lié à la « rentabilité ». Il devient impossible pour eux de trouver un modèle où s’épanouir, et d’être le médecin qu’ils désirent être.
Pourquoi est-ce difficile pour un soignant de prendre soin de sa santé physique et mentale ?
Un soignant se trouve face à de multiples mécanismes de résistance : syndrome du sachant, manque de temps, souci de la confidentialité. À cela s’ajoute la crainte d’être « catalogué » et que certains associent santé mentale et incompétence. La peur de savoir peut également constituer un frein au diagnostic. Et beaucoup de soignants souffrent de la solitude dans leurs difficultés. C’est aussi la raison pour laquelle je me suis notamment engagé dans l’association SPS, qui propose une plateforme de mise en contact avec des psychologues.
Le parcours de Maxim Challiot
Maxim Challiot est médecin spécialisé en médecine physique et réadaptation, diplômé depuis 2020. Après trois premières années en milieu hospitalier public et en clinique privée, il change de voie et intègre une Ueros (Unité d’évaluation de réentraînement et d’orientation sociale et professionnelle), dont le rôle est d’accueillir et d’accompagner les personnes dont le handicap résulte d’un traumatisme crânien ou d’une lésion cérébrale acquise. Il est également intervenant au sein de l’association SPS (Soins aux Professionnels de la Santé), qui vient en aide aux professionnels de la santé ou aux étudiants et qui agit en prévention pour le mieux-être.