Améliorer la santé des hospitaliers
Focus prévention
Pourquoi les étudiants en IFSI sont-ils plus nombreux qu’avant à abandonner leur formation ou à échouer à obtenir leur diplôme ? Parmi les causes identifiées, une santé mentale qui se dégrade, au point d’être aujourd’hui un sujet de préoccupation majeur en termes de santé publique. « On estime que près de 25 % des jeunes ont déjà eu des pensées suicidaires, avec une augmentation des passages aux urgences pour ce motif, et qu’ils sont 15 % à présenter un risque de dépression, qui se manifeste notamment par des troubles anxieux », explique Aude Caria, directrice de Psycom, organisme public d’information sur la santé mentale et de lutte contre la stigmatisation. « Et l’hôpital n’offre pas forcément un contexte de travail favorable à la santé mentale », déplore la psychologue clinicienne.
Conscients du problème, les établissements hospitaliers, qui accueillent des stagiaires venus des IFSI, déploient différents dispositifs afin d’offrir un encadrement plus sain et un parcours d’accueil qui soit non maltraitant. « J’ai été surprise de la violence qui entourait la transmission du savoir à l’hôpital, trop souvent vexatoire ou humiliante, raconte Céline Diascorn, DRH du centre hospitalier public du Cotentin, à Cherbourg. Nous avons donc développé, avec ma direction, un système de tutorat en dégageant des heures pour que les agents volontaires se forment au rôle de tuteur et s’y consacrent au quotidien. » Les services qui accueillent mal les stagiaires s’en voient privés. Son établissement propose aussi un accompagnement de dernière année pour ceux qui vont le rejoindre après leur formation : « Ils peuvent choisir leur futur service, ce qui les sécurise et permet une prise de fonction dans de bonnes conditions. »
Un programme inspiré de ce qui a fait ses preuves ailleurs dans le monde
« Arriver à l’hôpital, dans un univers méconnu avec des malades partout, des professionnels déjà expérimentés, un stress permanent, ça peut être violent, confirme Anne Kleiss, coordinatrice des instituts paramédicaux IFSIAvicenne-Jean Verdier, à Bobigny. On a choisi de nouer des partenariats avec les lycées pour bien expliquer la formation en amont, notamment avec des étudiants, car nous croyons beaucoup à la transmission par les pairs ». S’ajoutent à cela différents dispositifs (commission « Violence, Harcèlement, Discrimination » pour traiter tous les signalements, charte de stage, formation au tutorat, etc.), ainsi que des rendez-vous individuels à chaque situation d’abandon ou d’interruption de formation, des entretiens systématiques à l’issue des stages et des ateliers de développement des compétences psychosociales* pour les étudiants de 3e année, avec le soutien de la MNH.
La mutuelle a en effet choisi de s’impliquer dans le développement des compétences psychosociales, via un programme actuellement testé à Bobigny, afin d’être déployé à plus grande échelle dès septembre. « C’est un projet innovant, qu’aucune autre mutuelle n’a jamais lancé, se réjouit Pauline Martinot, présidente du conseil scientifique de la direction de la prévention de la MNH. On est partis des besoins exprimés par les étudiants, puis on a repéré les initiatives déjà menées à l’international et qui portent leurs fruits, comme les buddies en Grande-Bretagne, chargés d’accueillir, d’accompagner et d’assurer le bien-être des étudiants qui arrivent à l’hôpital. » Le concept de théâtre d’improvisation, mis en place en Nouvelle-Zélande et qui aide à mieux communiquer et exprimer ses besoins, fait aussi partie des idées retenues. « Le programme s’accompagne d’un protocole carré en termes d’évaluation d’impacts. Cela nous permettra d’identifier ce qui a bien ou moins bien marché, avant de faire essaimer le projet sur le territoire », détaille Pauline Martinot. La phase de test en cours livrera bientôt ses premiers enseignements.
-
Le sujet a fait l’objet d’une table ronde, organisée le 21 mai dernier par la MNH dans le cadre du salon Santexpo et intitulée « Améliorer la santé psychologique des étudiants en IFSI : un enjeu d’attractivité pour l’hôpital ». [EG1]
* L’OMS définit les compétences psychosociales comme les capacités de nature sociales, émotionnelles ou cognitives à faire face aux exigences et aux défis de la vie quotidienne.
[EG1]https://www.santexpo.com/salon-santexpo/fr/session/14153d75-ead6-ee11-8…